LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT EST-ELLE UNE LIBERTE FONDAMENTALE ?
Conseil d'Etat, 20 septembre 2022, Panchaud, n°451129
Quelles sont les conditions pour introduire un référé-liberté devant le juge administratif ?
La loi du 30 juin 2000 a instauré, au titre des procédures administratives contentieux d'urgence, la faculté d'introduire un référé-liberté devant le juge administratif. Cette procédure n'est pas soumise à la règle d'une décision administrative préalable : le juge peut ainsi être saisi d'un comportement, ou d'une décision.
Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, il est possible de former un référé-liberté si plusieurs plusieurs conditions cumulatives sont remplies, le juge administratif statuant alors dans un délai du 48 heures.
- Une situation d'urgence : cette condition est apprécié plus sévèrement que dans le cadre d'un référé-suspension (Conseil d'Etat, 28 février 2003, Commune de Pertuis, n°254411);
- L'exercice d'une prérogative appartenant à l'administration
- Une atteinte manifestement grave et illégale, y compris en cas de carence de l'administration : cette condition est appréciée compte tenu des moyens dont dispose l'autorité administrative et des mesures qu'elle a déjà prises (Conseil d'Etat, 28 juillet 2017, Section française de l'observatoire international des prisons, n°410677) ;
- Une atteinte à une liberté fondamentale.
S'agissant de cette dernière conditions, la jurisprudence administrative a élargi au fur et à mesure des années la liste des libertés fondamentales pouvant faire l'objet d'un référé-liberté : libre administration des collectivités territoriales, liberté de manifestation, liberté de culte, droit de grève, respect de la vie privée, droit à l'hébergement d'urgence, droit à la scolarisation d'un enfant handicapé, la liberté d'aller et venir,...
Le juge administratif prendra toute mesure utile afin de faire cesser l'atteinte à une liberté fondamentale.
Qu'est-ce que le droit de vivre dans un environnement sain ?
Le droit à l'environnement dispose d'une composante procédurale, à savoir un droit à la protection de l'environnement. Il repose sur plusieurs principes : principe de précaution, principe pollueur-payeur, information et participation du public, principe de non-régression,...
L'article 1 de la Charte de l'environnement garantit à tous le droit de vivre dans un environnement sain.
Existe-il une liberté fondamentale de protection de l'environnement au sens du référé-liberté ?
OUI - Les faits d'espèce étaient tels que les requérants estimaient que des travaux (altération d'une haie de cyprès) portaient atteinte à des espèces protégées et entrainaient la destruction de leur habitat, de manière irréversible et irrémédiable.
Après avoir vu leur demande rejetée par une ordonnance du tribunal administratif de Toulon le 25 mars 2021, les requérants se sont pourvus en cassation devant le Conseil d'Etat.
Par son arrêt du 20 septembre 2022, le Conseil d'Etat offre à la justice environnementale une nouvelle voie de droit et annule l'ordonnance des juges du fond.
En effet, il a reconnu pour la première fois que le droit de vivre dans un environnement sain et équilibré était une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
Il s'agit de la première fois où la Haute Juridiction accepte de reconnaitre la protection de l'environnement comme une liberté fondamentale, suivant ainsi la voie de plusieurs tribunaux administratifs avant lui.
Une telle reconnaissance poursuit en réalité la volonté d'une proposition formulée dans la communication publiée le 10 mars 2021, dans le cadre d'une Mission "flash" sur le référé spécial environnement, demandant notamment de prévoir la possibilité d'invoquer les dispositions prévues par la Charte de l'environnement lors d'un référé-liberté.
Cependant, le juge administratif a refusé de faire droit à la demande des requérants au cas d'espèce, et a rejeté leur requête. En effet, il estime qu'il n'y a pas d'extrême urgence dès lors que les requérants n'avaient pas contesté la délivrance d'autorisations antérieures portant sur ces mêmes travaux. Egalement, il considère que l'atteinte n'est pas grave et manifestement illégale compte-tenu de la nature du projet et de l'étude d'impact dispensée. En conclusion, aucun enjeu de conservation notable n'a été identifié sur la parcelle des requérants.
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