UN AGENT PUBLIC PEUT-IL FAIRE RETIRER LA PUBLICATION EN LIGNE D'UNE NOMINATION MENTIONNANT SON HANDICAP ?
QUELS SONT LES FAITS DE L'ESPECE ?
Une personne en situation de handicap est nommée et titularisée pour exercer la fonction d'inspecteur des finances publiques. Cependant, il souhaite faire retirer la publication de sa nomination sur le site internet des ministères économiques et financiers car elle fait mention d'un décret relatif au recrutement des personnes handicapées. Le travailleur considère que le fait qu'il puisse désormais être identifié comme travailleur handicapé est une atteinte au droit au respect de la vie privée et plus précisément au droit au respect des données personnelles sur internet.
Après deux refus de son administration, il saisit alors le Tribunal administratif puis la Cour d'appel administrative sans succès. Il se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d'Etat.
QUEL EST L'INTERET DE LA PUBLICITE DES NOMINATIONS ?
De son côté, l'administration défend l'intérêt et même l'obligation qu'elle a de publier ces arrêtés de nomination. En effet, il est inscrit à l'article 28 de la Loi du janvier 1984 portant dispositions statutaires pour la fonction publique d'Etat que les nominations d'agents publics doivent être publiées.
Cela vise à garantir les droits des tiers qui pourraient être lésés par cette nomination et qui doivent pouvoir être informés afin d'effectuer un éventuel recours. C'est aussi une garantie nécessaire au respect du principe d'égal accès aux emplois publics énoncé à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
QUE PEUT DEMANDER L'AGENT ?
L'agent n'est pas pour autant dépourvu de droits et de garanties visant à préserver son droit au respect de la vie privée consacré notamment par l'Article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.
Néanmoins, lorsqu'il s'agit des données personnelles, le respect de ce droit fondamental est assuré au niveau européen par le règlement européen du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD ).
La question était alors de savoir si ce règlement européen était applicable aux faits de l'espèce. Contrairement aux premiers juges du fond, selon les conseillers, la seule publication de données permettant d'identifier une personne sur un site internet suffit à les qualifier de données personnelles et rend applicable le RGPD.
En vertu de ce règlement, le travailleur est donc en droit de demander à l'administration de prendre des mesures pour limiter le traitement de ces données personnelles au strict nécessaire.
QUELLE CONCILIATION EST EFFECTUEE PAR LE CONSEIL D'ETAT ?
Après avoir rappelé que la Loi du 6 janvier 1978 impose que les données à caractère personnel fassent l'objet d'un traitement adéquat, pertinent et limité au nécessaire par rapport aux finalités poursuivies, le Conseil d'Etat va opérer une subtile conciliation entre les droits de l'agent public et les droits des tiers ainsi que le principe d'égal accès aux emplois publics.
Il considère en premier lieu que la simple mention d'un décret sur le recrutement des personnes handicapées ne fait pas basculer les données en question dans la catégorie des données personnelles de santé strictement encadré par le RGPD, faute de pouvoir identifier la nature et la gravité du handicap de l'agent.
En revanche, il affirme que cette publication n'étant justifiée que pour garantir le droit des tiers à exercer un recours contre la nomination, une fois le délai de recours contentieux expiré, cette publication doit être réduite. En effet, le Conseil d'Etat juge disproportionné le maintien permanent en ligne de l'acte complet de nomination alors qu'il est possible de ne laisser sur le site internet qu'un extrait de cet acte ne permettant pas d'identifier que l'agent est en situation de handicap.
L'agent en situation de handicap a donc obtenu la disparition de la mention de son handicap dans la publication en ligne de son acte de nomination.
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décembre 2024
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